Yan 'Dargent
Armanel - conteur
Jean-Édouard
Dargent dit Yan 'Dargent (né àSaint-Servais, 15 octobre 1824 – mort à Paris,
19 novembre 1899) est un peintre et illustrateur français dont la
majeure partie de l'œuvre picturale est consacrée à sa région
natale, la Bretagne.
Son
père, Claude Dargent, émigré lorrain, est tanneur, et sa mère,
Marguerite Perrine Clémentine Robée, fille de Pierre Robée
aubergiste, tenait également le relais de poste et le débit de
tabac ; pendant la Monarchie de Juillet, Claude Dargent devint maire.
Jean Edouard n'a que deux ans quand sa mère décède. Son père
se remarie à Saint-Pol-de-Léon, et l'enfant est élevé par ses
grands-parents. Pierre Robée, grand-père maternel, ancien marin,
confie l'enfant à l'un de ses oncles, Thomas, vieux chouan,
instituteur à Plouaret, où il aura comme condisciple François-Marie
Luzel, poète, folkloriste, puis archiviste, qui restera son ami.
Il
est d'abord élève au collège Saint-Joseph de Landerneau, puis en
1836 à l'institution Notre-Dame du Kreizker de Saint-Pol-de-Léon,
où il fait des études médiocres, avant de rejoindre son père à
Landerneau.
Son
grand-père voulait en faire un marin, mais Yan' préférait les
mathématiques et le dessin.
En
1840, d'abord dessinateur à Brest dans l'entreprise de travaux
publics Déniel, il entre après examen dans l'administration des
Ponts et Chaussées, puis passe à la Compagnie des chemins de fer de
l'Ouest qui doit construire la ligne de chemins de fer entre Morlaix
et Brest, où il est chargé de faire des relevés topographiques.
En
1846, alors inspecteur des travaux à la construction de chemin de
fer de Montereau, sa rencontre avec Jules-Nicolas Schitz, professeur
de dessin du lycée de Troyes, qui l'engage à développer ses
talents, sera déterminante. Considéré comme autodidacte, il n'a
jamais fait partie d'une « école », ce qui a pu nuire à sa
carrière.
En
1849, sa compagne, Aimée Louise Eulalie Crignou, donne naissance à
un fils, Ernest, que Yan' ne reconnaîtra qu'à la mort d'Aimée, en
1861.
En
1850, alors qu'il est pressenti par sa compagnie des chemins de fer
pour la réalisation d'un chantier en Espagne, et, sur les instances
réitérées du fils de l'éditeur Furne qui avait deviné ses
talents, il donne sa démission pour se consacrer à son art
d'illustrateur, et s'installe à Paris. Pendant dix ans il poursuit
sa production artistique et expose tous les ans, sans succès, au
Salon de Paris, à partir de 1851.
En
1861, il présente quatre tableaux (Les Lavandières de la nuit,
Souvenir de collège, Les Pilleurs de Mer à Guissény, Pâtres des
plaines de Kerlouan). Théophile Gautier fait l'éloge des
Lavandières de la nuit (aujourd'hui au musée des beaux-arts de
Quimper). Sa renommée est faite.
À
ce succès sans suite, il trouve, comme son ami et rival Gustave
Doré, dans l'illustration de livres (au total environ 200), une
rémunération plus régulière que la vente de ses toiles.
Il
est aussi un illustrateur très fécond, pour des revues telles que
le Magasin pittoresque, le Musée des familles, La vie à la
campagne, ou La France illustrée.
Armanel
- conteur
Près
de Saint-Pol-de-Léon, à Créac'h-André, il fait construire une
villa, à l'endroit même où écolier à Saint-Pol, il venait en
promenade le jeudi et le dimanche.
Le
3 juillet 1867, il épouse Eugénie Antoinette Stéphanie Mathieu,
musicienne, fille du peintre Eugène Mathieu et directeur de la
publication La France illustrée. De 1869 à 1878, il est chargé par
le clergé de la décoration de plusieurs églises : Saint-Servais,
Landerneau, Morlaix, Ploudalmézeau et surtout la cathédrale
Saint-Corentin de Quimper dont il réalise l'ornementation de toutes
les chapelles latérales, qui lui prendra sept ans.
Son
œuvre est inégale, il connaît une période académique, mais il a
aussi réalisé, en dehors des Lavandières de la nuit, son œuvre la
plus célèbre, de superbes peintures comme la Petite Roscovite, qui
se trouve exposée à la mairie de Saint-Pol-de-Léon. Il a également
peint de magnifiques couchers de soleil sur les grèves de Roscoff,
ainsi que de beaux tableaux sur les paysages du Léon.
En
1877, il est fait chevalier de la Légion d'honneur.
En
décembre 1885, à la mort d'Eugénie Mathieu, il se fixe
définitivement à Créac'h-André.
Lors
de la création de l'Union régionaliste bretonne en 1898, il accepte
d'être le premier président de la section des Beaux-Arts.
À
la fin de sa vie, en proie à des difficultés financières, il sera
accueilli par son fils.
Il
meurt le 19 novembre 1899 à Paris, d'une embolie pulmonaire, et est
enterré à Saint-Servais.
Armanel
- conteur
Avant
sa mort, il avait demandé à être enterré à Saint-Servais, et que
sa tête soit déposée dans l'ossuaire qu'il avait décoré, à côté
des ossements de sa mère et de ses grands-parents, selon la pratique
de l'époque.
Un délai de cinq ans étant nécessaire pour les
descendants, c'est le 8 octobre 1907 que son fils, Ernest Yan'
Dargent, muni de l'approbation de l'évêque de Quimper et de Léon,
fait ouvrir le cercueil afin de procéder à la décollation. Mais
après huit ans, le corps est encore en bon état de conservation, et
l'abbé Guivarc'h est obligé de trancher lui-même la tête. La
belle-famille, (issue du second mariage de Claude Dargent), intente
un procès, qui durera six mois, à Ernest et à l'abbé pour
violation de sépulture, et abus de pouvoir de la part du fils,
légataire universel. Le 26 juin, le tribunal correctionnel de
Morlaix prononce l'acquittement, mais Ernest meurt quatre jours plus
tard, sous le coup de l'émotion.
Le chef de Yan' Dargent
est toujours enfermé dans un reliquaire en zinc, à droite de
l'autel de l'ossuaire.
Un musée lui est consacré dans sa ville
natale de Saint-Servais.
Il y a quelques années toutes
les fresques de la cathédrale de Quimper, réalisées par Yan'
Dargent ont été restaurées. Cela a permis à ce peintre oublié de
sortir de l'anonymat. Une étudiante de l'université de Brest lui a
consacré sa thèse.
De nombreuses rues portent son nom en
Bretagne.