Phadrig et le Phouka
Traduction Armanell - conteur
Le Phouka est un être sociable, et bien souvent il aide les fermiers dans leurs travaux si il est bien traité et considéré avec gentillesse. Il est, normalement, invisible aux yeux humains, mais prends souvent l’apparence d’un cheval, d’une chèvre ou d’un taureau.
Un jour, le fils d’un fermier ( qui était aussi meunier) menait le bétail aux champs, quand il sentit quelque chose passer dans ses jambes comme un grand courant d’air ; mais il ne fut pas effrayé car il savait que c’était le Phouka qui se rendait au vieux moulin de son père qui était construit le long du ruisseau où les fées et les lutins se réunissaient chaque nuit. Aussitôt, le jeune garçon se mit à crier :
- « Phouka, Phouka ! arrête-toi et montre moi à quoi tu ressembles, et je te donnerai mon grand manteau afin que tu n’attrapes pas froid. »
Alors un jeune taureau s’est dressé devant lui, les naseaux écumant et fouettant sa queue comme un fou ; mais le jeune Phadrig tint sa promesse et ôtant son manteau il le jeta sur le dos du taurillon furieux. Aussitôt, la bête se calma et proposa à Phadrig de se rendre au moulin la nuit même quand la lune serait haute et qu’il aurait une très bonne surprise en guise de récompense de sa bonne action.
Aussi, à la nuit tombée, Phadrig se rendit au moulin mais il ne vit rien dans l’obscurité si ce n’est des sacs de blé renversés sur le sol, car les ouvriers s’étaient endormis et qu’aucun travail n’avait été effectué de la journée. Comme il était lui aussi très fatigué, Phadrig s’allongea sur le sol et s’endormit rapidement, et quand il se réveilla, très tôt le lendemain matin, tout le grain avait été moulu, bien que les ouvriers fussent toujours en train de dormir.
Intrigué par ce fait, Phadrig retourna trois nuits de suite au moulin, et trois fois, il trouva les ouvriers endormis, et trois fois, le matin, à son réveil, il trouva tout le blé moulu. Aussi, Phadrig décida d’y retourner une fois encore et de tout faire pour rester éveillé afin de pouvoir observer ce qui se passait pendant la nuit.
Il y avait une grande armoire à grains à l’intérieur du moulin. Phadrig décida de grimper à l’intérieur afin de s’y cacher, et de surveiller la pièce à travers le trou de serrure afin de voir ce qui allait se passer. Et à minuit, pile à minuit, six petits lutins entrèrent dans le moulin. Chacun de ces petits êtres portait un sac de blé sur son dos. Ils étaient suivis par un vieil homme habillé de lambeaux de tissus qui les encouragea à faire tourner la meule, et ils ont tourné, tourné, jusqu’à ce que tout le grain soit moulu. Alors Phadrig courut vers son père pour lui raconter ce qu’il avait vu, et ce dernier décida de se rendre au moulin avec son fils la nuit suivante ; Et ils assistèrent, tous les deux, au même spectacle que les nuits précédentes. Le meunier dit à son fils :
_ Pour moi, il n’y a aucun doute tout cela c’est le Phouka qui vient travailler toutes les nuits dans le moulin. Laissons-le travailler si cela l’amuses. De toute façon les ouvriers sont feignants comme des poux et ne pensent qu’à dormir. Dès demain je vais les renvoyer chez eux. Je laisserai le Phouka travailler à sa guise, et je lui laisserai la part de farine dont il a besoin pour se nourrir.
Ayant fait ce qu’il avait dit, le fermier devint rapidement riche, car il n’avait plus besoin de payer des ouvriers et que son blé était moulu sans que cela lui coûte un centime. Evidemment, dans le village, tout le monde se demandait d’où lui venait cette richesse soudaine, mais jamais il ne parla à personne du Phouka, car il savait que s’il dévoilait son secret, le Phouka s’enfuirait loin de son moulin.
Phadrig prit l’habitude de se rendre régulièrement a moulin et de se cacher dans l’armoire afin de voir les lutins travailler. Phadrig aimait ce petit peuple et il eut rapidement pitié du pauvre vieux Phouka qui n’avait que des haillons pour se vêtir alors que c’était lui qui dirigeait l’équipe de lutins et que ce n’était pas toujours facile de les moudre le blé, car ces derniers pensaient plus à s’amuser qu’à travailler. Aussi, un jour, il prit un peu d’argent dans le coffre de son père et se rendit en ville pour acheter un beau costume en soie qu’il déposa le soir même sur le sol du moulin juste à l’endroit précis où le se tenait pour diriger son équipe, puis il alla se cacher dans l’armoire.
- Qu’est ce que c’est ? », dit le Phouka en voyant les vêtements « Ce costume est-il pour moi ? Si je les porte je serai aussi beau qu’un prince ! »
Et le Phouka prit les vêtements, s’habilla et se mit à marcher de long en large, en se tenant sur la pointe des pieds, en bombant le torse, et en se pavanant comme un Lord. Mais soudain, il se rappela du grain et de pourquoi il était là et remit son équipe de lutins au travail. Puis il s’arrêta et s’écria :
- « Non, non, non, ça ne va pas ! Qu’est ce que je fais là ? Un Lord ne moud pas le grain. Je vais partir et voyager de par le monde afin de montrer partout mes beaux vêtements »
Et le Phouka poussa d’un coup de pied rageur ses vieux haillons dans un coin et s’en alla.
Il n’y eut pas de grain moulu cette nuit-là, ni la nuit suivante, ni celle d’après ; tous les petits lutins avaient disparu et le moulin était devenu silencieux. Phadrig était malheureux d’avoir perdu son ami et il prit l’habitude de courir à travers champs et de crier :
- Phouka, gentil petit Phouka, revient me voir ! Laisse-moi voir ton visage. »
Mais le vieux Phouka ne revint jamais et Phadrig ne le revit jamais plus.
Pendant tout ce temps, son père avait gagné tellement d’argent qu’il n’avait plus besoin de l’aide du Phouka. Il vendit le moulin, acheta une belle maison en ville et mit Phadrig à l’école. Phadrig travailla si bien à l’école qu’il devint un grand savant et un gentleman très riche et eut sa propre maison, des terres et plusieurs serviteurs. Et un jour il se maria avec une belle jeune femme, si belle que le jour du mariage, tous les invités disait qu’elle devait être la fille du roi des fées.
Une
chose étrange se produisit pendant le banquet : Quand tous les
invités se sont levés pour porter un toast à la santé de la
mariée, Phadrig, qui se tenait près de sa femme, sentit quelque
chose se glisser dans sa main : Une coupe en or pleine de
vin.
Et personne ne savait comment cette coupe était apparue
dans sa main, mai Phadrig se dit que c’était le cadeau de mariage
de son ami le Phouka. Il but le vin sans avoir peur et fit aussi
boire sa femme. Et ils vécurent en bonne santé toute leur vie et ne
manquèrent jamais de rien. La coupe en or fut précieusement gardée
comme un trésor dans la famille et les descendants de Phadrig ne
l’ont jamais vendue. Et c’et chez l’arrière, arrière, arrière
petit fils de Phadrig que je l’ai vue, posée sur la cheminée.