Les Femmes Cornues
Irlande _ Tipperary
Armanel - conteur
Slievenaman , "montagne des femmes" est une montagne de 721 mètres d'altitude, située dans le comté de Tipperary , en Irlande. La montagne est imprégnée de folklore. Sur son sommet se trouvent les vestiges d'anciens cairns, considérés comme des portes vers l' autre monde..
Cette histoire s’est passée il y a plus de 500 ans à BallyPatrick, près de la montagne de Slievenaman dans le comté de Tipperary en Irlande.
Ce soir là, une femme qui possédait une grande ferme était restée tard dans la nuit à carder et à préparer la laine pendant que toute la famille et les domestiques étaient allés se coucher. Soudain, on frappa à la porte et une voix appelât:
_ «Ouvrez! Ouvrez! »
_ "Qui est là?" demanda la femme qui cardait à l’intérieur de la maison.
_ "Je suis la sorcière à une corne", a répondu la voix au dehors.
La maîtresse de maison, supposant que c’était une de ses voisines qui avait appelé et qui demandait de l'aide, ouvrit la porte et une vieille femme entra, tenant dans sa main une paire de cardeurs à laine. Cette femme portait une corne au milieu du front. La corne semblait bien réelle comme si elle y avait poussé. La vieille femme s'assit près du feu sans dire un seul mot et commença à filer la laine à une vitesse incroyable, comme la maîtresse de maison, qui était pourtant réputée pour son travail, n’avait jamais vu auparavant. Soudain la vieille femme s'est arrêtée et à dit à haute voix:
_ "Où sont les autres femmes? Où sont-elles restées traîner ? Elles devaient déjà être là."
Alors un second coup fut frappé à la porte et une voix appela comme auparavant:
_ "Ouvrez! Ouvrez!"
La maîtresse de maison se sentit obligée de se lever et d'ouvrir pour répondre à l'appel. Une seconde sorcière entra aussitôt, ayant deux cornes sur le front et un rouet à la main pour filer la laine.
_ "Donnez-moi de la place", dit-elle; "Je suis la sorcière à deux cornes" et elle se mit à tourner la roue aussi vite que l'éclair.
Et les coups ont continué à être frappés à la porte, et à chaque fois que quelqu’un frappait à la porte, la maîtresse de maison se levait pour aller ouvrir la porte, et les sorcières sont entrées, l’une après l’autre, jusqu'à ce que finalement douze femmes se retrouvent assises autour du feu - la première avec une corne et la dernière avec douze cornes. Et elles ont cardé la laine et tourné leurs rouets, et ont enroulé et tissé, chantant ensemble une ancienne chanson, mais elles ne parlèrent pas à la maîtresse de maison. Et elles étaient étranges à entendre et effrayantes à regarder, ces douze femmes avec leurs cornes et leurs rouets. La maîtresse de maison se sentait au seuil de la mort et, prise de panique, elle essaya de se lever pour pouvoir appeler à l'aide, mais elle ne pouvait pas bouger, elle ne pouvait pas non plus pousser un seul mot ou un cri car les sorcières lui avaient lancé un sort qui la paralysait.
Puis l'une d'entre eux l'a
appelée en irlandais et lui a dit:
"Lève-toi, femme, et fais-nous un gâteau."
Alors, la maîtresse de maison a cherché un récipient pour aller chercher l'eau au puits afin de préparer le gâteau, mais elle n'a pu en trouver aucun. Alors les sorcières lui dirent:
_ "Si tu n’as pas de pot à eau, prends une passoire et apporte de l'eau dedans."
Et la maîtresse de maison prit la passoire et alla au puits; mais l'eau en sortait par tous les trous, et elle ne pouvait rien rapporter à la maison pour faire le gâteau. Paniquée à l’idée de mettre les sorcières en colère, elle s'assit au bord du puits et pleura.
Alors, une voix sortit du puits et lui dit :
_ "Prenez de l'argile jaune et de la mousse, mélangez-les et enduisez la passoire pour qu’elle devienne étanche."
La maîtresse de maison fit ce que la voix du puits lui avait conseillé, et la passoire retint l'eau nécessaire pour confectionner le gâteau.
Et la voix dit encore :
_ "Retournez maintenant chez vous et quand vous arriverez à l'angle nord de la maison, criez trois fois à haute voix et dites:
_ 'La montagne des femmes Fenianes et le ciel au dessus sont en feu."
Et la femme a fait comme la voix du puits lui avait commandé.
Lorsque les sorcières qui se trouvaient à l'intérieur ont entendu l'appel, un cri grand terrible s'est échappé de leurs lèvres et elles se sont précipitées avec des lamentations et des cris sauvages et se sont enfuies sur Slievenamon, où elles habitaient.
Alors l'Esprit du puits a ordonné à la maîtresse de maison d'entrer et de préparer sa maison contre les enchantements des sorcières si elles revenaient.
Et tout d’abord, pour briser leurs sorts, la femme a aspergé l’eau dans laquelle elle avait lavé les pieds de son bébé sur le seuil de la porte d’entrée, car il est bien connu que c’est le meilleur moyen d’empêcher une sorcière de franchir le seuil d’une maison. Ensuite, elle a pris le gâteau que les sorcières avaient fait en son absence, car pour confectionner ce gâteau les sorcières avaient mélangé du sang prélevé aux membres de la famille endormie pour faire la pâte. Et elle a cassé le gâteau en morceaux, et en a mis un dans la bouche de chaque dormeur, afin d’enlever le sort que les sorcières leur avaient jeté. Et enfin, elle sécurisa la porte avec une grande traverse fixée dans les montants, afin qu'ils ne puissent pas entrer.
Et ayant fait tout cela, elle attendit.
Quand elles s’aperçurent qu’elles avaient été piégées, les sorcières ne tardèrent pas à revenir et elles se déchaînèrent en criant vengeance.
_ "Ouvrez! Ouvrez!" ont – elles crié. "Laissez-nous marcher sur le seuil de cette maison!"
_ "Je ne peux pas," dit le seuil, "Il y a de l’eau qui a servi à laver les pieds du bébé éparpillée sur le sol et elle vous entraînera vers le Lac."
_ "Ouvrez, ouvrez, bois et arbre et poutre!" ont-elle pleuré devant la porte.
_ "Je ne peux pas", dit la porte; "car la poutre est fixée dans les montants et je ne peux pas bouger."
_ "Ouvrez, ouvrez, gâteau que nous avons fait et mélangé de sang", ont-elles pleuré à nouveau.
_ "Je ne peux pas," dit le gâteau, "car je suis brisé et meurtri, et mon sang est sur les lèvres des enfants endormis."
Alors les sorcières se précipitèrent dans les airs en poussant de grands cris et s'enfuirent vers Slievenamon, en prononçant d'étranges malédictions contre l'Esprit du puits, qui avait souhaité leur perte. Mais la femme et la maison furent laissées en paix, et le châle que les sorcières avaient tissé pendant la nuit fut jeté par l'une des sorcières avant de s’envoler et fut suspendu près de la cheminée par la maîtresse en signe du terrible combat de la nuit; et ce manteau était resté en possession de la même famille de génération en génération pendant cinq cents ans. Et c’est dans cette petite maison de BallyPatrick que je l’ai vu, toujours accroché près de la cheminée.