Le cornemuseux de Tipperary
jerlande _ Tipperary

Traduit par Armanel.


Si vous passez par Tipperary, en Irlande, vous entendez peut être quelqu'un vous raconte l'histoire du Cornemuseux de Tipperary. Plus personne ne sait quand cette histoire s’est passée. Certains dire même qu'elle n'est pas vraie, que c'est une légende, voire un conte de fées. Et pourtant…

Voila ce qui s'est passé autrefois à Tipperary en la verte Erin.

Dans cette petite ville vivait une famille pauvre. Il y avait le père, la mère et les quatre enfants. Quatre fils. Trois d'entre ils étaient très forts et vigoureux et aidaient leurs parents dans toutes les tâches de la petite maisonnée. Mais le quatrième, le petit dernier, était encore au berceau. Et ce n'était pas parce qu’il était au berceau qu’il était facile à élever. Bien au contraire. Il était une source continue de tracas pour ses frères et ses parents.

Le premier problème venait de son physique. Il ne sera pas présent en rien à un enfant normal. Il avait la peau verte (comme un martien) et il avait des yeux qui faisaient tellement peur à tout le monde ils brillaient, on aurait dit de la braise incandescente dans une cheminée. De plus il avait des dents pointues comme celles des loups et si longtemps qu'il ne pouvait pas fermer la bouche et qu'il j'avais tout le temps. Ses mains étaient couvertes de poils de chèvre si longs qu'ils cachaient ses mains et qu'on ne pouvait pas lui compter ses doigts. Et ses jambes. Elles étaient si longues et si tordues qu’on aurait dit des pattes de grenouille.

Mais le deuxième problème, le plus gênant pour tout le monde était qu'il hurlait tout le temps, nuit et jour et à tue-tête, sauf quand il mangeait.

Les gens à Tipperary, jasaient et disaient que ce ne pouvait pas être un enfant d’humain. Que ce bébé avait peut-être été déposé dans le berceau par des sorcières. Il faut vous dire qu'à cette époque il y avait beaucoup de  « Morganes » (des fées, si vous préférez) qui réussissent dans les roseaux qui poussaient le long de la rivière Suir qui baigne Tipperary.

Bref, la vie n'était pas facile à la maison et tout le monde s'exaspère après ce petit monstre ; Il s'en fallaitt de peu qu’il ne fit mourir de chagrin toute la maisonnée. Une cause de ses crises, il était impossible de dormir, et il mangeait tellement que bien souvent il ne restait rien pour les autres.

Mais, un jour, alors qu'il hurlait à vous déchirer les tympans et le cœur, et que sa mère s'épuisait à essayer de le calmer, un vieux joueur de cornemuse aveugle arrive devant la maison.

A cette époque, les joueurs de musique itinérants n’étaient pas rares. Ils allaient de village en village et proposaient de jouer pour les fêtes ou pour les veillées. En échange, ils pouvaient dormir dans les granges sur la paille et recevoir une assiette de soupe pour repas.

Tim Caroll, c’était son nom. Tim Caroll donc, s’arrêta sur le pas de la porte et écouta le vacarme assourdissant venant des poumons du bébé, puis il entra et vint s’asseoir près du feu pour sécher ses vêtements trempés par l’averse qui venait de tomber.

Allez savoir pourquoi, peut être pour vérifier que son instrument n’avait pas souffert de la pluie, Tim sorti sa cornemuse de sa besace et se mit à en jouer. Et chose étrange, dès les premières notes de musique, le bébé arrêta de hurler. Et tandis que Tim jouait un vieil air irlandais, le gamin riait, claquait des mains, tapait des pieds, essayait de sortir du berceau pour attraper l’instrument. Il en avait même oublié de réclamer à manger. C’est pour vous dire.

Etonnée et réjouie la mère demanda au vieux joueur de cornemuse aveugle de prêter son instrument au bébé pendant que Tim mangerait son assiettée de soupe. Et tandis que Tim s’asseyait au bout de la table, le bébé souffla dans la cornemuse et rejoua la chanson que Tim venait de jouer sans se tromper une seule fois, comme s’il la connaissait par cœur. Mais plus surprenant encore, il improvisa ensuite un deuxième air, puis un troisième, puis encore un autre, et un autre, et un autre.


Tout le monde était bien étonné et se demandait où il avait bien pu apprendre toutes ses chansons, et pendant ce temps là, le petit jouait de nouveaux airs, sans se tromper, sans se fatiguer, comme s’il avait fait ça toute sa vie.

Mais quand il fallut lui reprendre la cornemuse, ce fut une autre histoire. Pour rien au monde il ne voulait s’en séparer et il ne la rendit à Tim qu’après en avoir reçu une autre toute neuve.

On pouvait penser que tout allait s’arranger, mais c’était encore pire qu’avant. Si auparavant la maison était pleine de cris désormais elle était remplie de musique, et je ne sais pas si vous avez déjà entendu une cornemuse, mais une cornemuse dans la maison je vous garanti que ça casse les oreilles. Aucun cornemuseux irlandais ne connaissait autant d’air que notre bébé dans son berceau, et beaucoup de musiciens venaient de fort loin pour apprendre tous ces nouveaux airs. Mais le problème n’était pas vraiment là.

Le problème était surtout que le gamin connaissait un air étrange, magique, qui obligeait tout le monde à danser. Dès qu’il +commençait cette chanson, vos jambes se mettaient à bouger toute seules, et tant que la musique ne s’arrêtait personne ne pouvait s’arrêter de danser, même s’il était fatigué, ou qu’il n’arrivait plus à respirer ou que son cœur menaçait de s’arrêter. Et il arriva ce qui devait arriver ; plusieurs voisins sont tombés malades à force de danser, les vaches ne donnaient plus de lait, le coq devenu fou chantait le soir au lieu de matin et les chiens hurlaient à la mort toute la journée.

Les parents avaient beau demander au jeune cornemuseux de s’arrêter, celui-ci faisait celui qui n’entendait pas et jouait sans cesse jour et nuit.

Très en colère, les gens du village de Tippary obligèrent la famille à déménager et partir loin du village. Le père fut donc obligé de prendre sa charrette et la dernière vache que la musique n’avait pas rendu malade. Il installa le cornemuseux dans la charrette avec sa mère et ils se mirent en route.

Ce fut un départ bien triste, et comme ils avaient les yeux pleins de larmes, ils ne voyaient même pas les amis qui étaient venus leur dire au revoir. Et ils se demandaient si un jour ils reviendraient dans la ville de Tipperary où ils avaient grandi. Seul, le petit placé dans le berceau sur la charrette semblait s'amuser beaucoup et il soufflait dans sa cornemuse comme si rien de grave n'était arrivé ce qui énervait beaucoup ses frères qui étaient obligés de marcher et de tirer sur la corde de la vieille vache.

Cela faisait maintenant longtemps qu'ils avaient quitté Tipperary et ils approchaient d'un pont sur la Suir (la rivière de Tipperary) quand le petit cornemuseux s'arrête de jouer, regarde autour de lui, écouta la rivière qui coulait sous le pont et poussa un énorme cri terrifiant. Si terrifiant que ses frères lâchèrent la corde de la vieille vache et se cachèrent sous la charrette.

Sous le pont, le courant grondait fort et sur le pont le vent se mit à souffler en tempête, les arbres sur la rive se couchaient et tombaient presque dans la rivière. Les oiseaux n'arrivaient plus à voler et les poissons n’arrivaient plus à nager. Un ce moment le petit monstre se mit debout dans son berceau et prenant son élan se jeta dans la rivière. Les parents et les frères se précipitèrent vers le parapet pour voir ce qui se passe et ils virent quelque chose chose d'incroyable : Le petit cornemuseux était assis au sommet d'une grande vague, les jambes croisées comme un fakir, et il jouait de la cornemuse. Il jouait ce fameux air qui fait danser de force même si on n’en a pas envie. La rivière le balançait gentiment au sommet des vagues et les poissons dansaient autour de lui et les oiseaux tournaient autour de sa tête, et ils disparurent au loin derrière un virage de la rivière qui s'enfonçait dans les roseaux.

Le vieux cornemuseux aveugle, Tim Caroll, qui se reposait sous un arbre à la sortie du pont leur dit que maintenant tout était fini. Que celui qu'ils croyaient être un bébé était en fait un Korrigan à qui une vilaine sorcière avait jeté un sort, l'avait déguisé en bébé et fait prisonnier dans ce berceau loin de la rivière. Pour être délivré de son sort, il devait passer sur un pont pour pouvoir sauter dans la Suir rejoindre sa famille au milieu des roseaux qui couvrent les rives.

« Il est allé rejoindre sa famille et les morganes des roseaux », répondit la mère.

Depuis ce temps là, on n'a jamais revu le cornemuseux dans la région, mais la nuit on entend parfois sa cornemuse siffler dans les roseaux du bord de l’eau et il parait que l’on peut aussi voir les morganes dansent en rondes joyeuses.