La petite poule rousse
proposé par le conteur Armanel
Il était une fois une petite poule rousse, qui vivait dans sa petite maison, toute seule. Un vieux Renard, habile et rusé, demeurait au milieu des rochers, sur une colline, non loin de là. Au fond de son terrier, maître Renard rêvait, le jour et la nuit, au moyen d'attraper la petite Poule rousse.
«Comme elle doit être tendre!» pensait-il. Si seulement je pouvais la mettre bouillir dans ma grande marmite! Quel fameux souper pour ma vieille mère et pour moi!
Mais il ne pouvait pas venir à bout de la petite Poule rousse, parce qu'elle était trop fine et trop prudente. Toutes les fois qu'elle sortait, elle fermait sa porte, et prenait sa clef, et quand elle rentrait, elle s'enfermait soigneusement, et mettait la clef dans la poche de son tablier, avec son dé et ses ciseaux.
A la fin, le Renard pensa qu'il avait trouvé un bon moyen. Il partit de grand matin, en disant à sa vieille mère :
- Mets la grande marmite sur le feu , nous aurons la petite poule rousse pour notre souper.
Il mit sous son bras un grand sac et courut jusqu'à la maison de la petite poule. Elle venait justement de sortir pour ramasser des copeaux afin d'allumer son feu. Le Renard se glissa derrière la pile de bois et, pendant qu'elle était baissée, il fila dans la maison et se cacha derrière la porte.
Une minute après, la petite poule rousse rentra, en disant :
- Je vais fermer la porte, et après je serai bien tranquille...
Et comme elle se retournait, elle vit le renard, avec son grand sac sur l'épaule! Hou! comme la petite Poule fut effrayée! Mais elle ne perdit pas la tête, elle laissa tomber ses copeaux, et vola sur la plus haute armoire, d'où elle cria au vilain vieux renard :
- Tu ne me tiens pas encore!
-
Nous allons voir ça, dit maître renard.
Et que croyez-vous qu'il fit ? Il se planta sur le plancher, juste au-dessous de la petite Poule rousse, et il se mit à tourner, à tourner, à tourner après sa queue, tout en rond, et de plus en plus vite, si bien que la pauvre petite Poule en fut tellement étourdie qu'elle en perdit l'équilibre et tomba juste dans le grand sac que le renard avait posé tout ouvert à côté de lui ! Il jeta le sac sur son épaule et partit pour sa caverne, où la marmite bouillait sur le feu.
Il lui fallait monter toute la colline, et le chemin était long. La petite poule rousse ne savait d'abord pas où elle en était, tellement la tête lui tournait; mais, au bout d'un moment, elle reprit ses sens; elle tira alors ses ciseaux de sa poche, et clip! fit un petit trou dans le sac et passa la tête au dehors. Quand elle fut à un endroit favorable, clip, clip, elle fendit le sac, se glissa dehors, tout en tenant le fond du sac et vite, vite, elle y fourra une grosse pierre.
Après quoi, elle prit son vol, et fila aussi vite qu'elle put jusqu'à la maison, où elle s'enferma bien soigneusement.
Le vieux renard continuait sa route, bien content, avec la pierre dans le sac, et se disant : " Comme cette petite Poule rousse est lourde; je ne la croyais pas si grasse. Elle va me faire un fameux souper! " Il arriva assez fatigué à la caverne, et, dès que sa vieille mère le vit, elle lui cria :
- As-tu la petite poule rousse ?
-
Oui, oui, dit-il. Est-ce que l'eau est chaude ?
- Elle bout à
gros bouillons, dit la vieille mère.
- Alors, attention. Ôte
le couvercle de la marmite, je secouerai le sac et ferai tomber la
petite poule rousse dedans, et toi, tu veilleras, de crainte qu'elle
ne s'envole.
La vieille mère renard ôta le couvercle de la marmite, et se tint tout près. Le renard ouvrit légèrement le sac sans regarder dedans, le prit par le fond et le secoua au-dessus de la marmite.
Plouf! plouf! La grosse pierre tomba dans la marmite, qui se renversa et échauda le renard et sa vieille mère, de sorte qu'ils furent tellement brûlés qu'ils en moururent.
Et la petite poule rousse resta dans sa petite ferme, où elle vécut heureuse tous les jours de sa vie.