Intersigne de la lumière dans le lit Clos
Lampaul - Plouarzel
Armanel - conteur


Cela s’est passé entre les deux guerres mondiales, à Lampaul-Plouarzel. Un couple de personnes âgées vivait dans la ferme d’Ar C’harbout. On avait presque oublié leurs noms car on ne les appelait que par leurs surnoms de Ar C’hanaill et de Perin Ar C’hanaill. Ce couple âgé avait un fils, Emile, qui était marié à une fille Lampaul nommée Jef. Mais comme il travaillait « dans la marchande », il s’était « exilé » au Havre. Emile et Jef avait eu un fils qui habitait lui aussi au Havre.

Emile naviguait beaucoup et ne rentrait que rarement au Havre, et même alors, il préférait rester dans sa cabine plutôt que de se rendre au domicile conjugal. Jef, quand à elle, faisait des séjours de plus en plus longs et fréquents « au pays ».

Un jour, leur fils tomba malade, et comme Emile était en mer, Jef est retourné au Havre pour s’en occuper. A peine arrivée au Havre, Jef apprit que son mari serait bientôt de retour au port, mais cette nouvelle ne la réjouissait pas vraiment. Elle n’était pas pressée de revoir celui avec qui elle était « mal mariée » et redoutait une nouvelle dispute dans le domicile conjugal. Aussi, dès que l’état de son fils s’est amélioré, elle s’est dépêchée de rentrer au pays.

Emile rentré à terre, découvrant le domicile conjugal vide, décida de se venger sur la bouteille et but plus que de raison. Comme, il avait le ventre bien chaud, il n’avait pas spécialement envie d’aller se plonger dans le lit froid de la maison vide. Aussi, il décida de rejoindre sa couchette à bord du bateau. Quand il arriva devant l’échelle de coupée, il faisait nuit et, on ne sait pas ce qui s’est vraiment passé, mais il tomba à l’eau et se noya.

Bref rien de vraiment surprenant. Que du banal, dirait-on.

Mais, au moment même, ou Emile se noyait, ses vieux parents, Ar C’hanaill et Perin Ar C’hanaill, étaient couchés dans leur lit clos, d’où ils furent tirés de leur sommeil par une lumière brillante. Et ce n’était pas une bougie ou une lampe qui était restée allumée car, jamais notre couple ne montait dans le lit avec de l’éclairage pour des raisons évidentes de sûreté. Et puis la lumière était d’un éclat qu’il n’avait jamais vu auparavant, sauf peut-être au sommet d’un phare. Choqués, nos deux vieillards ne purent pas se rendormir, et c’est le lendemain, de bonne heure, qu’ils apprirent la nouvelle du décès accidentel de leur fils.

La mère, Perin ar C’hanaill, se rendit au havre, avec une cousine à elle, pour chercher le corps. Quand les deux femmes arrivèrent, le cercueil était déjà fermé, mais les deux femmes insistèrent pour le faire ouvrir afin que Perin puisse voir son fils une dernière fois.

Dès que Perin s’approcha du cadavre de son fils, ce dernier se mit à pleurer des larmes de sang.